Un sourire rayonnant sur une bouche loquace d’où jaillit une voix swingante, dense, dansante. Un visage expressif au regard complice. Un corps épanoui en mouvement constant, vibrant de boogie. Un aréopage de jazzmen français barbus.
Ms. Nickki et sa bande se sont emparées de la scène.
Ms. Nickki , vous la connaissez déjà un peu, même sans l’avoir entendue. Elle, sa sœur, sa grand-mère, faisaient trembler la scène des théâtres de vaudeville noirs depuis des décennies quand elles ont gravé les premiers blues dans les années 20. Lestes, déchirantes, pleines d’humour et de rythme, elles ont dominé de leurs voix de bronze les grands orchestres de Kansas City et les pianos des claques de la Nouvelle-Orléans. Le rhythm’n’blues, avec Big Mama, le Chicago Blues, avec Koko, la soul surtout les ont consacrées. À la fin des années 80, leur petite cousine du Bronx a imposé dans le hip-hop macho et clinquant la même liberté, la même sincérité. Davantage encore, quand l’ivresse du samedi le cède à la joie du dimanche, vous les avez entendues faire tonner dans le temple l’annonce des jours heureux. Elles sont encore là, si vous les écoutez. Il n’y a pas que dans le Mississippi rural que le blues n’est pas mort.
Ms. Nickki, c’est une histoire simple, que vous reconnaîtrez de toutes ces autres femmes. L’enfance à Holly Springs, dans ces collines rurales du Nord Mississippi, bastion qui nous a donné Fred McDowell, les Burnside, les Kimbrough, où prêche le Reverend John Wilkins. Le temple du dimanche, où la communauté entière déferle dans les chants et danses gospel, et où, comme tant d’autres chanteuses, elle prend toute enfant le lead pour son cantique favori, son programme de vie : « Cette petite lumière que j’ai, je vais la laisser briller ». Puis l’âge adulte, et l’exode rural vers Memphis, pour le travail.
La jeune Nicole ne tardera pas à les rejoindre sur les scènes minuscules des juke-joints urbains
Memphis, la vieille reine du blues, de la soul et du rock’n’roll, est étrangement et peut-être heureusement ignorée de la musique mondiale dans ces années-là. Oubliée mais toujours trépidante, elle cultive depuis les années 80 un jardin secret protégé de scènes locales extraordinaires de feeling et d’originalité dans une tradition maintenue vivante.
En rock’n’roll, c’est surtout le label français New Rose qui l’a dévoilée. En blues, seul ou presque le label High Water du docteur David Evans enregistrera – en même temps que RL Burnside, Junior Kimbrough et Jessie Mae Hemphill – le son des vétérans des studios Hi et Stax et de Beale Street : Big Lucky Carter, les Fieldstones, les Hollywood All Stars… La jeune Nicole ne tardera pas à les rejoindre sur les scènes minuscules des juke-joints urbains, faisant ses classes comme Memphis Minnie les avait faites, sur le tard, d’abord sur Beale Street, puis, après sa rénovation pour le meilleur et le pire à destination des touristes, au légendaire Wild Bill’s, dernier refuge de Big Lucky et des All Stars, dont elle est aujourd’hui la chanteuse résidente.
Comme souvent, c’est l’Europe qui donne aux artistes afro-américains les plus downhome, les moins soumis aux dictats désinfectés du show-biz la chance de voler dans un ciel plus large. Aujourd’hui, c’est Ms. Nickki qui a cette chance – et surtout vous, celle de l’entendre. Ne la laissez pas passer !
A découvrir le samedi 20 mai à 22h30 sur la scène du Blues Rules Crissier Festival 2017.
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