Après leur visite du Pays du Blues (International Blues Challenge) et leur très remarquée prestation à European Blues Challenge, The Two est décidément lancé pour une belle année 2015 : en plus de la 6ème édition du Blues Rules, ils feront la tournée des petits festivals du coin (Montreux Jazz Festival, Zagreb International Blues Festival, Festi’neuch, Festival Blues’n’Jazz de Rapperswil…)
Un Grand merci à Yannick qui a pris le temps de tapoter du clavier :
Comme vous avez pu l’entendre notre participation à l’International Blues Challenge a été une expérience incroyable. Nous avons pu rencontrer des musiciens du monde entier, jouer dans un cadre mythique et fouler le sol des racines de la musique qui nous fait vibrer. Laissez moi donc répondre à vos quelques questions…
Aviez-vous déjà joué aux Etats Unis avant (dans le cadre de The Two, ou pour d’autres projets) ?
Non, aucun de nous deux n’avait jamais eu l’occasion de fouler le sol américain en tant que musicien.
Avant d’y aller pour de vrai, quelle idée vous faisiez vous de Memphis ?
Nous n’avions pas vraiment d’idée préconçue de cette ville. Nous en avions surtout entendu parler et ne savions pas vraiment à quoi nous attendre. C’est surtout grâce à sa réputation au niveau de la musique que nous la connaissions, car l’histoire de Memphis est liée à celle du blues mais aussi à celle de la Soul.
Et votre premier ressenti en arrivant ?
Nous avons eu énormément de retard avec nos vols, nous avons manqué des correspondances, si bien que nous avons pratiquement mis 24h pour nous rendre à Memphis. Nous sommes donc arrivés très fatigués de notre voyage. Mais nous étions tous deux très excités d’enfin pouvoir marcher sur cette terre qui a vu fouler toutes les légendes du blues.
L’International Blues Challenge, véritable ambiance de compétition ou plutôt cool comme atmosphère ?
L’international Blues Challenge est une énorme machine. Tout est ultra organisé si bien que malgré les plus de 200 musiciens tout fonctionne à merveille. L’ambiance change vraiment suivant les groupes. Certains sont venus pour gagner et d’autres pour vivre une expérience où le résultat importe peu. Nous avons fait énormément de rencontres incroyables, mais principalement avec des musiciens non-américains. Les américains vivent plus cette manifestation comme une compétition, tandis que les européens ou les australiens par exemple la vivent plus à la cool.
Avez vous fait de belles rencontres musicales là bas ? Avec vous partagé la scène avec quelques gars du cru ?
Nous avons fait énormément de rencontres durant ce festival, noué des liens avec des musiciens incroyables. Nous avons spécialement été impressionnés par les artistes non-américains qui selon nous apportent de la fraîcheur dans ce blues américain parfois figé. Nous pourrions notamment citer les Travellin’ Brothers d’Espagne, Hat Fitz et Cara Robinson d’Australie, Angela Esmeralda et Sebastiano Lillo d’Italie, nos amis français Pillac ou encore Mathieu Pesqué et Roll Pignault. Nous nous attendions à faire pâle figure face à des artistes du cru, mais ça n’a pas forcément été le cas. Nous avons pu partager la scène avec plusieurs artistes locaux, dont certains bien évidemment nous en ont mis plein la vue, mais nous nous attendions à pire…
L’esprit du blues est-il encore bien palpable sur Beale Street ?
Oui et non… Beale street c’est un peu Disney Land. La journée c’est une rue très « blues » et le soir c’est une rue remplie de discothèques. Alors oui, il y a des clubs mythiques qui ont vu passer des artistes de renom. Mais c’était tout de même bizarre…
On s’est fait la réflexion d’ailleurs sur l’état du blues, sa nature, et tel qu’il était présenté sur Beale street. Tu ne peux pas enfermer le blues, le figer dans un endroit. Comme l’art, le blues doit être en perpétuel mouvement, sinon il s’étiole et meurt. Beale street semblait n’être qu’une sorte d’épouvantail maquillé, aux déguisements clinquants, parfait pour égayer les touristes qui, après avoir roté leur barbecue ribs, diraient : « Le blues c’est génial ! »
On y a été qu’une semaine mais Beale street nous semblait un peu vivre sur son histoire. Le blues y était consumérisme, Le fond de commerce, une machine à fric où limite un verre d’eau du robinet était payant.
Au final, on s’est beaucoup questionné. Nous nous sommes demandés qu’est-ce qu’est l’esprit du blues ? Qu’en est-il au juste aujourd’hui ? Qu’est devenu le chant des champs de coton? Qu’en est-il de son peuple, quand trop souvent aux coins des rues soit des hommes ou des femmes de la communauté noire vous abordent, mendiant un dollar ou un repas?
Cette définition du blues, lu au Stax records muséum, avait retenu notre toute attention : « Blues music emerged from the Deep South. It had roots in the songs of the field workers and the music of the rural black Church. Its melancholy tones were, as the great B.B. King said, « an expression of anger against shame and humilation. » If jazz was democracy in action, free flowing in form and expression, then the blues was the expression of a people who were denied full participation in American democracy. The blues voiced the daily range of emotions that African Americans experienced-both personal and political. »
Quel bilan tirez vous de cette séquence américaine ?
Disons que cette expérience nous a énormément appris. D’une part nous avons appris à gérer notre stress, faire avec malgré les aléas (nous avons joué une semaine sur des guitares amochées par notre respectueuse compagnie d’aviation). Nous avons baigné dans un univers durant une semaine, pris des leçons de technique, de virtuosité, de simplicité aux travers de tous les artistes que nous avons côtoyés. Puis nous avons aussi énormément recherché sur notre son, notre univers, nos faiblesses, nos forces… Si bien que nous en revenons grandis, autant humainement qu’artistiquement. Nous nous sommes questionnés sur le blues, qu’est-ce qu’il représente aujourd’hui aux Etats-Unis, que représente-t-il pour nous… Nous n’avons pas trouvé de réponse àMemphis, mais notre questionnement a énormément évolué.
Prochaine étape, Bruxelles, pour The European Blues Challenge… des espoirs, des appréhensions ?
On a mis du temps à vous répondre. Du coup on rentre tout juste de Bruxelles. Notre expérience américaine nous a appris que nous ne jouons pas un blues traditionnel, que notre blues ravi certaines personnes mais qu’il en gêne d’autre. Du coup nous partions sans pression pour Bruxelles. L’envie principale étant de nous présenter, d’utiliser cette fenêtre pour nous faire connaître et pour donner notre point de vue sur le blues. Je vais reprendre le compte rendus de Fred Delforge (un habitué du Blues Rules) pour décrire notre prestation. Ses mots nous ont beaucoup touché: « On reste là encore en terrain connu avec les amis Suisse de The Two et avec leur blues tellement contre nature qu’il en devient une nouvelle règle non écrite mais tellement légitime que l’on signe sans retenue en bas de la page. Des plages du Léman à celles de Maurice, il n’y a que quelques brasses que les deux complices franchissent avec un tel talent qu’elles les font passer sans que l’on ne s’en rende compte par les eaux boueuses du Mississippi. A en juger par la réaction du public, la recette fonctionne et les alternances entre les moments apaisés et les accès de colère ne font qu’accentuer le capital charme d’un duo qui réussit ce soir à emmener l’assistance dans son voyage au cœur du blues qui se finira comme toujours dans un blues créole à vous retourner les tripes. Difficile de ne pas être fan de ces deux gars là ! »
Et bien sur, on se retrouve au Blues Rules Crissier Festival le 29 mai ! Il y a un certain Lucky Peterson qui jouera sur scène juste avant vous… impatients ?
Comme on a pu vous le dire à plusieurs reprises, ça va être un honneur pour nous de jouer sur cette scène du Blues Rules. On y bosses depuis plusieurs années, on y a appris beaucoup de choses et cette fois c’est à notre tour. En plus nous aurons la chance de pouvoir jouer après Lucky Peterson, on se demande bien si ce soir c’est lui le chanceux…
On compte sur vous pour enflammer la jam finale (on dit déjà en coulisses que Lucky et son band resteront peut être aussi le samedi…)
Ben comme chaque année c’est toujours un plaisir de participer à cette jam. Bien que nous devions gérer la technique en même temps ce qui ne nous laisse des fois pas vraiment le temps d’en profiter en tant que musiciens. Mais c’est aussi ça notre boulot en tant que bénévole au Blues Rules, offrir les meilleures conditions aux groupes pour qu’ils puissent se faire plaisir.
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